L’auberge des pirates de James Ernest, chez Origames
Un jeu de poche, qu’on vous dit !
Il y a des jeux qui s’imposent comme une évidence au sein d’un groupe de joueurs. Dès la première partie, tout le monde y trouve son compte. Le plaisir est évident, et les parties s’enchaînent. Je joue assez souvent avec mes enfants, et s’il est parfois difficile de trouver des titres qui contentent les plus grand comme les plus petits, nous avons enfin trouvé celui qui nous met tous d’accord !
L’auberge des pirates, donc. Un petit jeu de 55 cartes rangées dans une petite boîte métallique qui tient aisément dans une poche, un sac. Le genre de boîte qui coûte une dizaine d’euros et qu’on chope lors d’une commande sur internet pour rajouter les trois euros qui manquent pour arriver à soixante et ne pas payer deux balles de frais de port. Précisément ce genre de boîte ! C’est, du coup, un jeu dont on n’attend pas grand chose… Parce que, c’est bien connu, la valeur d’un jeu se mesure à sa profusion de kilogrammes, n’est-ce pas ?
Bon, on est chez les pirates… Et que font les pirates ? Allez, un petit effort, c’est simple, quand même ! Ils s’attaquent ! Ils se défient ! Ils s’accusent… de trucs ! Et surtout, ils… piochent !!! Quoi ? Vous ne le saviez pas ? Ben faut suivre, les amis, fianchtre ! Et pour gagner, il faut être le dernier en jeu. Duncan McLeod style, et tant pis si la référence passe au-dessus de vos jeunes années !
Sont pas belles, mes illus ?
On commence donc le jeu avec trois cartes en main. Chaque joueur va en choisir une qu’il posera face cachée, les deux autres composant sa main. Les joueurs révèlent leur carte et la laissent face visible sur la table. Le joueur avec la carte de la valeur la plus basse commence alors à jouer. Et là, attaque, défi, accusation ou pioche !
- Pour une attaque, il suffit de prendre une carte de sa main et de la poser face visible dans la collection d’un joueur. La seule règle est de ne pas créer de paire avec les autres cartes de ce joueur.
- Lors d’un défi, on retourne la première carte de la pioche, et on prie pour ne pas faire de paire avec les cartes visibles du joueur défié. Si on forme une paire, on est éliminé, on devient un sorte de poussière dans le vent, et on pleure Tessa - toujours la même réf., pour ceux qui se demanderaient. Si on n’en forme pas, on élimine son adversaire - rebelote, violons et chanson triste.
- Quand on accuse un adversaire, on pense qu’il détient une paire entre les cartes qu’il a étalées face visible sur la table et les cartes qu’il a en main. Il nous montre donc sa main afin de connaître la sentence. S’il a effectivement une paire, même s’il voulait vivre pour toujours, ben c’est raté ! Sinon, c’est votre tête qui tombe !
- Dernière option, la pioche… Là, c’est moins mortel : il s’agit simplement de piocher une carte et de l’ajouter à sa main !
L’illustrissime “Homme au cucul” !!!
Simple, non ? Et pas très excitant sur le papier… Mais il y a encore un petit truc qu’il faut prendre en considération : la carte numérotée 1 n’est présente qu’une fois dans la pile, celle numérotée 2, deux fois… Ainsi de suite jusqu’à la carte numéro 10 qui existe en dix exemplaires. Du coup, il est facile d’imaginer qu’un adversaire n’ayant qu’un 2 et un 3 visibles pourra assez logiquement être défié sans trop de risques, alors que celui qui a un 10, un 8, un 7 et un 6 ainsi que trois cartes en main aura de bonnes chances d’avoir une paire sur l’ensemble de ses cartes, et que l’accuser sera une bien meilleure idée que le défier !
C’est tout ! On joue, on est éliminé ou on survit… Le dernier en piste - et rappelez-vous, il ne peut en rester qu’un ! - gagne la partie. Je vous préviens, ça va râler, crier à l’injustice, voire, jeter ses cartes de frustrations. Ça va aussi glousser, se gausser et pétiller de bonheur ! Les parties sont tellement courtes et le hasard tellement présent, en fin de comptes, que ça ne vaut même pas la peine de faire la tête plus de huit secondes. C’est perdu ? On y retourne dans deux minutes ! Vous êtes le grand vainqueur ? On en reparle dans trois cents secondes… Record à 4 parties gagnées d’affilée, chez nous !
Indice de Glopitude d’Andy : Glop moumoute
L’Auberge des Pirates est un petit jeu qui joue dans la même cour qu’un Love Letter. En fait, il est même plus accessible que Love Letter puisqu’il n’y a pas de pouvoirs à comprendre. On joue une carte, et la sentence tombe immédiatement. J’étais sceptique, à la lecture des règles. Et puis on a joué, avec les enfants. Et le jeu s’est révélé extrêmement addictif, finalement ! Je le range dans la catégorie des jeux de secours : ceux que je glisse dans mon sac quand je sors, au cas où je serais coincé dans une cabane de moutonnier des Highlands avec de quatre à sept autres personnes. Ok, ça ne m’est jamais arrivé, mais on n’est jamais assez prudent sur ce plan-là. Et puis, je me dis que si les mecs sont vraiment captivés par leur partie, ils en oublieront peut-être de sortir leur lame…
Choix et stratégies : On ne peut pas dire qu’il n’y ait pas de choix à faire, dans L’Auberge des Pirates. Il faut soupeser les différentes probabilités de survivre : vais-je devoir accuser Bob parce qu’il a de grosses cartes étalées ? Le Kurgan essaie-t-il de bluffer en piochant des cartes depuis trois tours ? Marie-Thérèse a-t-elle vraiment dit que Pedro n’était qu’un ramassis de pisse de bouc en gelée ? Vous voyez ? Subtil, quoi ! | |
Immersion dans le thème : Les pirates, c’est presque universel, moins que les Aliens ou les dinosaures, pour certains - et là, je vais être très clair, il y en a qui ont tort ! -, m’enfin, je ne pense pas trop me tromper en disant que ce thème parle à tout le monde. Ici, il manque peut-être quand même une petite variante, genre un duel d’insultes à la Guybrush Threepwood, pour doper l’idée que je me fais d’un affrontement sanglant entre pirates redoutables… “J’avais un chien qui était plus intelligent que toi !”→ “Il a dû t’apprendre tout ce que tu sais !”… Ça, ça serait la vraie classe, non ? | |
Beauté du matériel : Le traitement graphique de Brett Bean, dans un style très cartoon, est vraiment sympa ! Les différents pirates ont leur style, et ont tout de suite déclenché des trouvailles de petits noms chez mes enfants ! “Gros Bedon”, “L’homme au cucul” ou … “Victor”, par exemple ! Ouais, on est un peu des cadors en surnoms, quand on s’y met !!! Les cartes sont assez épaisses. Seul petit reproche ? La boîte est pile assez grande pour les cartes, du coup, j’ai un peu de mal à les sortir quand on veut jouer… | |
Limpidité des règles : Il faut environ deux minutes pour expliquer le jeu, en traînant ! Et pas besoin de retourner vérifier quoi que ce soit ! Du coup, c’est clair comme une explosion de quickening ! | |
Envie de rejouer : Une vingtaine de parties sur les trois jours qui ont suivi la découverte de ce jeu ! Ça a le mérite d’être clair ! Après, je ne crois pas qu’on reste insensible à ce genre de jeux : on aime, et on s’en gave, ou on n’y trouve pas son compte et on ne joue pas la troisième partie. Personnellement, je le préfère à Love Letter pour sa plus grande simplicité. | |
Spécificités et paramètres : Plus on est de fous, plus on rit, avec ce jeu ! L’intérêt à deux ou trois joueurs est beaucoup limité qu’à six ou sept. Quinze minutes pour une partie me semble particulièrement exagéré, surtout en-dessous de six joueurs. Nous, on est entre 4 et 5 minutes de moyenne. Le 7 ans et plus est presque inexact : un enfant qui connaît les nombres entre 1 et 10 peut jouer. Il n’aura pas une idée exacte des probabilités de succès de telle ou telle action, mais, franchement, même en sachant ça, l’aventure est au bout de la pioche, dans le suspense intenable du retourné de carte !!! Basile, 5 ans, y joue, chez nous. Et il se marre, ou fait la tête, ou se marre… |